Historique : 2 pays de l’AES quittent l’Organisation internationale de la Francophonie.

Dans un contexte de révision des partenariats hérités du passé colonial, le Niger et le Burkina Faso annoncent leur retrait de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF). En adoptant cette décision, ces deux États, qui font partie des structures de l’AES (Alliance des États du Sahel), affichent leur volonté de redéfinir leurs relations internationales et de repenser leurs alliances régionales.
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Un retrait officiel et revendiqué
Le gouvernement nigérien a officiellement notifié son départ de l’OIF par l’intermédiaire d’une lettre adressée aux ambassadeurs, transmise via la France, qui héberge le siège de l’organisation. Ce geste intervient quelques mois après la suspension opérée à la suite d’un renversement qui a écarté l’ancien président Mohamed Bazoum élu en juillet 2023. Le Niger, pays fondateur de l’institution depuis 1970, s’inscrit désormais dans une logique d’autonomie en lien avec l’AES, structure régionale regroupant des État Frontaliers à l’instar du Mali et du Burkina Faso autour d’intérêts communs.
Par ailleurs, le Burkina Faso, dans la même veine, a engagé une procédure similaire. Bien que les autorités burkinabè n’aient pas diffusé d’annonce officielle, plusieurs sources fiables confirment le retrait. L’appartenance à l’AES, dont le Burkina Faso est également membre, renforce l’idée d’une réorganisation des partenariats, visant à limiter l’influence des anciennes puissances.
Suspension et démarches administratives
Les événements récents ont amené le Niger à être suspendu de l’OIF, à la suite d’un coup d’État qui a renversé Mohamed Bazoum. La procédure, prévue par la Charte de la Francophonie, impose l’envoi d’une notification officielle à la France. Ce protocole a été respecté, officialisant ainsi le choix de l’État nigérien.

La porte-parole de l’OIF, Oria K. Vande Weghe, a fait part du regret de l’organisation tout en reconnaissant le droit souverain de chaque pays à déterminer ses propres relations internationales. La situation se situe également dans le cadre des discussions menées au sein de l’AES, où la reconfiguration des liens avec l’ancienne puissance coloniale suscite de vifs débats.
Réformes internes et redéfinition des alliances régionales
Depuis l’arrivée d’une junte dirigée par le général Abdourahamane Tiani à Niamey, le Niger a engagé une série de mesures visant à réduire l’influence de l’héritage colonial. Dès les débuts du changement, la coopération avec l’OIF avait été interrompue, prélude à une série d’actions concrètes. Ainsi, dans la capitale, plusieurs rues et monuments ayant des noms à consonance française ont été rebaptisés, et le centre culturel franco-nigérien, autrefois portant le nom de Jean Rouch, a cessé de fonctionner dans le cadre d’un partenariat binational.

Cette réorganisation s’inscrit dans une dynamique plus large portée par l’AES, qui regroupe les États du Sahel désireux d’ajuster leurs alliances internationales. L’appartenance à l’AES offre un cadre de concertation permettant aux États membres de discuter d’initiatives communes et de renforcer leur autonomie dans la gestion de leurs partenariats extérieurs.
Réorganisation régionale et implication de l’AES
Le retrait de l’OIF s’inscrit dans un contexte plus vaste de révision des partenariats régionaux. Outre l’Organisation internationale de la Francophonie, le Niger et le Burkina Faso ont décidé de se retirer de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Cette décision, annoncée en janvier 2024 et mise en application dès janvier 2025, traduit une volonté de repenser les liens traditionnels et de privilégier des alliances au sein de l’AES.

L’AES apparaît ainsi comme une plateforme de coopération privilégiée dans la région, permettant aux États membres de dialoguer sur des sujets allant de la sécurité aux questions économiques, tout en affirmant leur indépendance vis-à-vis des anciennes structures influencées par la France. Les autorités des deux pays estiment que cette nouvelle orientation permettra de mieux répondre aux défis contemporains et aux enjeux spécifiques du Sahel.
L’OIF face aux évolutions du paysage international
L’Organisation internationale de la Francophonie, qui compte aujourd’hui 91 États et gouvernements, se trouve confrontée à la nécessité d’adapter ses missions. Sa vocation initiale de promotion de la langue française et de la diversité culturelle se heurte désormais à des réalités géopolitiques en pleine mutation. La décision du Niger et du Burkina Faso, membres ou partenaires potentiels de l’AES, interroge sur l’avenir de l’institution.
Les responsables de l’OIF continuent néanmoins d’affirmer leur engagement en faveur des projets en cours dans les pays francophones. Même si le retrait de deux membres historiques représente un revers, l’institution espère pouvoir maintenir ses actions, tout en se réadaptant aux nouvelles configurations établies par les États de l’AES et d’autres structures régionales.
Réactions internationales et implications pour l’AES
Sur la scène internationale, les annonces de retrait suscitent des réactions diverses. Plusieurs observateurs et responsables diplomatiques notent que ces décisions traduisent une volonté de certains États de recentrer leurs priorités et d’orienter leurs partenariats vers des structures régionales telles que l’AES. La visite du président ghanéen John Dramani Mahama dans la région, visant à rétablir un dialogue entre les pays concernés, s’inscrit dans cette démarche de réévaluation des alliances.
Cependant, il apparaît que le Mali, souvent cité dans le cadre de discussions avec le Burkina Faso et le Niger, n’a pas encore entamé de démarche similaire. Ce cas souligne que la réorganisation des partenariats reste variable d’un État à l’autre, même si l’AES demeure un espace de convergence pour ceux qui souhaitent revoir leurs rapports avec l’ancienne puissance coloniale.
Perspectives d’avenir et enjeux pour l’AES
Les décisions récentes prises par le Niger et le Burkina Faso interviennent dans un contexte de transformations multiples au sein de la région. En se retirant de l’OIF et de la CEDEAO, ces pays affichent clairement leur volonté d’explorer de nouvelles pistes de coopération, notamment par le biais de l’AES. Ce choix ouvre la voie à une redéfinition des relations internationales en Afrique de l’Ouest et dans le Sahel.
Dans un environnement où les partenariats historiques sont remis en question, l’AES est appelé à jouer un rôle dans le rapprochement des États du Sahel. Cette plateforme de dialogue et de coopération pourrait ainsi servir de cadre pour des échanges plus adaptés aux enjeux sécuritaires et économiques de la région. Par ailleurs, les autorités des pays concernés continuent d’examiner leurs options afin de renforcer leurs alliances et de diversifier leurs partenaires internationaux.
La réorganisation des liens internationaux dans le Sahel, notamment avec l’appui de l’AES, incite à observer attentivement l’évolution des rapports entre les anciennes colonies et leurs anciens colonisateurs. Si l’OIF poursuit ses actions en faveur de la langue et de la culture françaises, les événements actuels démontrent que la configuration des partenariats est en pleine mutation. L’implication de l’AES dans cette dynamique témoigne d’une volonté de regroupement des États du Sahel autour d’intérêts communs et d’un désir d’autonomie affirmé.
En somme, le retrait du Niger et du Burkina Faso de l’Organisation internationale de la Francophonie, assorti d’un éloignement de la CEDEAO, traduit une révision des rapports internationaux. En s’inscrivant dans le cadre de l’AES, ces décisions montrent que les États du Sahel cherchent à redéfinir leurs liens et à repenser leur coopération régionale. Le suivi de cette réorganisation sera déterminant pour l’avenir des alliances dans la région, alors que l’AES apparaît comme un forum privilégié pour aborder les défis communs.
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