L’ancien président ivoirien, Laurent Gbagbo, a annoncé mercredi 16 octobre son intention d’améliorer les relations entre la Côte d’Ivoire et les régimes militaires de l’Alliance des États du Sahel (AES) s’il revient au pouvoir. Lors d’une interview accordée à AFO Média, le média fondé par Alain Foka, ex-journaliste de Radio France Internationale (RFI), Gbagbo a exprimé sa volonté de normaliser les relations avec ces États, qu’il considère « comme des États, tout simplement », malgré leur arrivée au pouvoir par des moyens non démocratiques.
LIRE AUSSI : Cameroun : L’absence prolongée de Paul Biya alimente les rumeurs
Soutien de Laurent Gbagbo aux régimes militaires de l’AES
Laurent Gbagbo a souligné qu’il portait « un bon regard » sur les juntes sahéliennes, en particulier celles du Mali, du Burkina Faso, et du Niger. Il a insisté sur le fait que, malgré leur prise de pouvoir par la force en 2020, 2022, et 2023 respectivement, ces régimes méritent d’être traités avec respect en tant qu’États souverains. Selon lui, cette approche pourrait contribuer à apaiser les tensions actuelles et renforcer les liens diplomatiques de la Côte d’Ivoire avec ses voisins sahéliens, ce qui, pour Gbagbo, est essentiel pour la stabilité régionale.
L’ex-président ivoirien considère en effet que ces pays, confrontés à des violences djihadistes persistantes, ont pris des décisions drastiques pour assurer leur propre sécurité et autonomie. Pour Laurent Gbagbo, le rejet de l’influence française par ces pays constitue un tournant significatif, et il entend établir une politique de rapprochement basée sur le respect mutuel et la coopération, en opposition à l’alignement systématique sur les positions occidentales.
Critiques de Laurent Gbagbo envers la CEDEAO
Au cours de son entretien, Laurent Gbagbo n’a pas manqué de critiquer la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), qu’il accuse de servir les intérêts de la France plutôt que ceux des États membres. Il a affirmé que la CEDEAO « est devenue un instrument de propagande » pour l’ancienne puissance coloniale et qu’elle n’a « plus de raison d’être ». Il a rappelé que les juntes sahéliennes avaient déjà décidé de quitter l’organisation en janvier, dénonçant son inaction face aux crises qui frappent leurs pays.
Selon lui, la CEDEAO, autrefois un outil de coopération régionale, a perdu de sa légitimité, notamment en raison de son incapacité à gérer les crises post-électorales, comme celles qui ont secoué la Côte d’Ivoire par le passé. Gbagbo a ainsi mis en avant l’importance d’une nouvelle vision pour l’Afrique de l’Ouest, une vision qui ne soit pas dictée par des intérêts extérieurs mais qui réponde aux aspirations des peuples de la région.
Ambitions politiques et mise en garde à Alassane Ouattara
Laurent Gbagbo a également profité de cette tribune pour réitérer ses ambitions politiques en vue de l’élection présidentielle de 2025 en Côte d’Ivoire, affirmant qu’il serait candidat. Cependant, il reste pour l’instant inéligible en raison de sa condamnation en 2018 à vingt ans de prison pour des faits liés à la crise post-électorale de 2010-2011. Malgré sa grâce en 2022 par l’actuel président Alassane Ouattara, il n’a pas été amnistié, ce qui l’empêche de se présenter pour le moment.
Gbagbo a par ailleurs mis en garde son successeur, Alassane Ouattara, contre un éventuel quatrième mandat, affirmant que la Constitution ivoirienne interdit explicitement plus de deux mandats. Il a ainsi déclaré que toute tentative de Ouattara de se présenter une nouvelle fois serait « condamnable ». Gbagbo s’est également montré critique face à l’arrestation de plusieurs cadres de partis d’opposition début octobre, dénonçant une « dérive dictatoriale » du pouvoir en place, ce qui, selon lui, démontre l’urgence d’un changement de cap politique en Côte d’Ivoire.