De quoi Emmanuel Macron est-il accusé par la presse italienne ?

La presse italienne de droite ne décolère pas : Emmanuel Macron serait en train de manœuvrer en coulisses pour tenter d’influencer l’élection du futur pape. C’est du moins ce que laissent entendre plusieurs titres transalpins après deux dîners privés organisés fin avril, au cours desquels le président français a rencontré des figures majeures de l’Église catholique. Derrière ces rencontres, certains éditorialistes voient une tentative de soft power français au Vatican. Retour sur une polémique aussi curieuse qu’inattendue, où le nom de Macron revient au centre d’une controverse politico-religieuse.
A lire aussi: Qui était le pape François, l’homme qui voulait une Église plus humaine ?
Une thèse portée par la droite italienne : Macron veut choisir le prochain pape
Tout est parti d’un article à la une du quotidien conservateur La Verità titrant sans détour : « Macron veut même choisir le pape ». Le journal affirme que le président français, à travers ses échanges récents avec des ecclésiastiques de premier plan, tenterait d’orienter l’élection du futur souverain pontife vers un candidat qui lui serait favorable, voire acquis à ses valeurs progressistes.

Cette théorie, relayée par d’autres médias italiens de droite, trouve sa source dans deux événements très précis. Le 25 avril, Macron dînait discrètement à Rome avec Andrea Riccardi, fondateur de la communauté Sant’Egidio, proche de nombreux cardinaux et habitué des arcanes du Vatican. Le lendemain, le président a participé à un déjeuner à l’ambassade de France auprès du Saint-Siège en compagnie de quatre des cinq cardinaux français électeurs du futur conclave. Parmi eux, le très influent Jean-Marc Aveline, archevêque de Marseille, considéré comme une figure montante au sein de l’Église.
Des repas privés qui enflamment l’imaginaire médiatique
Ces deux rencontres ont suffi à susciter l’emballement d’une certaine presse italienne, prompte à dénoncer un supposé néo-gallicanisme. Pour les détracteurs de Macron, il ne s’agirait ni plus ni moins que d’une tentative d’ingérence dans un processus sacré, réservé aux cardinaux, et placé sous le sceau du secret. Le fait que ces réunions se soient déroulées à huis clos et dans un contexte très informel alimente les soupçons.

La proximité affichée entre Macron et certains milieux catholiques progressistes, notamment ceux représentés par Riccardi ou Aveline, renforce cette perception. Plusieurs éditorialistes évoquent un projet plus large : celui de voir émerger à Rome un pape ouvert aux valeurs sociales, écologiques et multiculturelles que défend régulièrement Macron sur la scène internationale.
Une tempête médiatique aux relents politiques
Mais cette polémique est-elle réellement fondée, ou s’agit-il d’une construction politique habilement orchestrée ? Pour de nombreux observateurs français et italiens modérés, l’hypothèse d’un Macron cherchant à manipuler une institution aussi complexe et cloisonnée que l’Église catholique relève davantage de la fiction que de la réalité. Aucun président, aussi influent soit-il, ne peut réellement peser sur un conclave, dont les mécanismes internes obéissent à des logiques spirituelles, géopolitiques et internes à l’Église.

Cependant, cette accusation trouve un certain écho dans le climat actuel de crispation idéologique en Italie. Le président Macron, souvent perçu comme arrogant par certains responsables italiens de droite, incarne une France volontiers moralisatrice, qui aime projeter son modèle universaliste au-delà de ses frontières. L’idée qu’il puisse vouloir « choisir le pape » s’inscrit dans cette grille de lecture hostile. En définitive, si Macron semble effectivement s’intéresser aux questions spirituelles — il l’a montré lors de ses discours sur la laïcité ou sa proximité avec certaines figures religieuses — rien ne prouve une quelconque volonté d’influencer concrètement le prochain conclave. La polémique, nourrie par une presse en quête de sensationnalisme, révèle surtout la persistance des fantasmes sur le rôle de la France dans l’histoire du Vatican.
Un commentaire