Pourquoi Tidjane Thiam renonce-t-il à la présidence du PDCI ?

L’opposant ivoirien Tidjane Thiam, ancien ministre et ex-patron du Crédit Suisse, a annoncé dans la nuit de dimanche à lundi qu’il renonce à la présidence du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI-RDA), poste qu’il occupait depuis décembre 2023. Cette décision fracassante survient alors qu’il fait face à une intense pression judiciaire mettant en doute la légalité de son élection. Dans une allocution publiée sur les réseaux sociaux, il dénonce un « harcèlement judiciaire » et annonce laisser la direction du parti à Ernest N’Koumo Mobio, vice-président doyen. Cette renonciation marque un tournant dans la vie politique ivoirienne à quelques mois de l’élection présidentielle.
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Un départ forcé sous pression judiciaire
Tidjane Thiam renonce à la présidence du PDCI à cause d’un procès en cours, intenté par une militante du parti, Valérie Yapo. Cette dernière conteste la légalité de son élection au poste de président en décembre 2023, en s’appuyant sur l’article 48 du Code de la nationalité ivoirienne. Cet article stipule qu’un citoyen perd sa nationalité s’il en acquiert une autre. Or, Tidjane Thiam a détenu la nationalité française pendant plusieurs années, avant d’y renoncer officiellement en mars 2025.

Selon la justice ivoirienne, cette naturalisation aurait provoqué la perte automatique de sa nationalité ivoirienne avant même son inscription sur les listes électorales. Il a d’ailleurs été radié de ces listes à la fin du mois d’avril. En se retirant de la présidence du parti, Tidjane Thiam espère rendre caduque la procédure judiciaire contre lui. Un juriste cité par la presse affirme que cette démission rendrait le recours sans objet, puisqu’il n’exerce plus le mandat contesté.
Un président par intérim pour stabiliser le parti
Dans sa vidéo, Tidjane Thiam renonce à la présidence et confie les rênes du PDCI à Ernest N’Koumo Mobio, doyen des vice-présidents du parti. Celui-ci a aussitôt convoqué un bureau politique extraordinaire ce lundi matin à Abidjan. L’objectif : officialiser cette transition, mais surtout apaiser les tensions internes et maintenir la cohésion au sein d’un parti déjà fragilisé.

Ernest N’Koumo Mobio a lancé un appel à l’unité, à la discipline et à la sérénité. Son intérim intervient dans un contexte hautement sensible, à moins de six mois de l’élection présidentielle prévue pour octobre 2025. Le retrait de Tidjane Thiam de la tête du parti bouleverse les calculs politiques du PDCI, déjà affaibli par la perte de son leader emblématique, feu Henri Konan Bédié.
Un retrait stratégique avant la présidentielle
Même s’il renonce à la présidence du PDCI, Tidjane Thiam ne se retire pas de la vie politique. Dans sa déclaration, il insiste sur sa volonté de rester en lice pour la présidentielle de 2025. « Cette décision ne change rien à l’engagement que j’ai pris en décembre 2023 de conduire notre parti à la victoire », a-t-il affirmé.

Mais cette ambition est aujourd’hui sérieusement compromise. Sa radiation des listes électorales le rend inéligible, et aucune révision n’est prévue avant le scrutin. Cette situation le place dans la même posture que d’autres grandes figures de l’opposition également écartées : Laurent Gbagbo, Charles Blé Goudé et Guillaume Soro, tous exclus pour des raisons judiciaires. Thiam dénonce une tentative manifeste d’« éliminer les leaders des principaux partis politiques de l’opposition », afin de garantir une victoire au pouvoir en place.
Alors que le président sortant Alassane Ouattara ne s’est toujours pas exprimé sur une éventuelle candidature, la scène politique ivoirienne s’embrase. Tidjane Thiam renonce à la présidence du PDCI, mais reste déterminé à incarner l’alternance. Sa bataille pour exister politiquement ne fait peut-être que commencer.
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