Daloa face à une insécurité urbaine : les coupeurs de route investissent la ville

La ville de Daloa, en Côte d’Ivoire, traverse une période de tension sécuritaire. Des groupes de coupeurs de route, traditionnellement actifs sur les axes isolés, opèrent désormais en zone urbaine. Leur cible : les conducteurs de motos, pris au piège de barrages factices imitant les contrôles policiers. Un phénomène qui oblige habitants et autorités à repenser leur approche face à cette menace grandissante.
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Des « corridors » trompeurs en pleine ville
Leur méthode est simple, mais redoutable. Ces individus installent des barrages illégaux, surnommés « corridors », sur des routes bitumées peu fréquentées, surtout la nuit. Vêtus d’uniformes ressemblant à ceux des forces de l’ordre, ils abusent de la confiance des usagers. Dans la nuit du 3 avril, sur la route reliant le Collège Diéty à l’Abattoir, un conducteur a cru se plier à un contrôle routinier. En ralentissant, il s’est retrouvé piégé, frappé et dépossédé de son véhicule. Les sapeurs-pompiers de Daloa, intervenus rapidement, ont permis de lui porter secours.

Un risque accru pour les déplacements nocturnes
Les attaques se concentrent sur des axes mal éclairés, où la faible visibilité et l’isolement favorisent les agressions. Les autorités locales conseillent désormais aux habitants d’éviter ces zones après la tombée de la nuit ou de rebrousser chemin face à tout contrôle suspect. « Si le barrage ne semble pas officiel, mieux vaut ne pas s’arrêter », résume un habitant, sous couvert d’anonymat.

Une réponse sécuritaire sous tension
Avec cinq commissariats et plusieurs brigades de gendarmerie, Daloa dispose d’un maillage sécuritaire dense. Reste que ces récentes attaques questionnent l’efficacité des dispositifs en place. Les forces de l’ordre multiplient les patrouilles, mais peinent à anticiper les déplacements rapides des coupeurs de route, qui changent régulièrement de lieux d’intervention. « Ces groupes profitent de la méconnaissance des usagers sur les procédures légales de contrôle », analyse un agent de police.
Entre défiance et adaptation citoyenne
L’inquiétude monte parmi les résidents, contraints de modifier leurs habitudes. Certains motocyclistes évitent désormais les trajets solitaires après 22 heures, tandis que d’autres équipent leurs engins de systèmes de tracking. « On ne peut plus faire confiance à un uniforme. Il faut vérifier les véhicules des agents, les plaques, les équipements », explique un commerçant, victime d’une tentative d’agression en mars.

L’urgence d’une coordination renforcée
Si les autorités appellent au calme, des voix s’élèvent pour réclamer des mesures plus fermes. Parmi les pistes évoquées : l’installation de caméras sur les axes sensibles, une meilleure formation des citoyens aux procédures de contrôle et un renforcement des effectifs policiers de nuit. Les sapeurs-pompiers, souvent premiers sur place, plaident pour des campagnes de sensibilisation aux gestes d’urgence.
Un espoir malgré l’adversité
Malgré les défis, la population garde confiance. Les récentes arrestations de plusieurs suspects dans des affaires similaires à Abidjan laissent entrevoir une possible collaboration interrégionale. « Ces groupes ne sont pas invincibles. Ils commettent des erreurs, et chaque erreur est une piste », souligne un gendarme.
La situation à Daloa reflète un problème plus large : l’adaptation des réseaux criminels aux failles des systèmes urbains. Si les motocyclistes restent les premières cibles, personne n’exclut une diversification des méthodes. Pour l’heure, la priorité est de briser le cycle de la peur. Comme le rappelle un élu local : « La sécurité n’est pas qu’une affaire de policiers. C’est une vigilance collective. »
Alors que la nuit tombe sur Daloa, les rues se vident plus tôt. Les habitants, entre prudence et résilience, espèrent voir renaître une sérénité perdue. Les prochaines semaines diront si les mesures promises suffiront à inverser la tendance.