Deux semaines après l’ouverture du procès de Corneille Nangaa et de ses alliés du M23, la justice congolaise a rendu son verdict. Le 8 août 2024, l’ex-président de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) et les principaux leaders du M23 ont été reconnus coupables de « crimes de guerre », « participation à un mouvement insurrectionnel » et « trahison ». Le tribunal militaire de Ndolo, à Kinshasa, a prononcé la peine de mort à leur encontre, marquant ainsi un tournant dans l’histoire judiciaire de la République démocratique du Congo (RDC).
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Un procès sous haute tension
Le procès de Corneille Nangaa, chef de file de l’Alliance Fleuve Congo (AFC), et de ses alliés du M23, a débuté le 24 juillet 2024 dans un contexte marqué par des tensions politiques et militaires accrues. Sur les vingt-six personnes jugées, seules cinq étaient présentes au tribunal, les autres, dont Corneille Nangaa, étant considérées comme « en fuite » et jugées par contumace. Le procureur avait requis la peine de mort contre Nangaa et la plupart de ses co-accusés, une requête qui a été suivie par la cour militaire.
Un autre prévenu a affirmé avoir rencontré Corneille Nangaa à Kigali à plusieurs reprises lors de réunions de planification d’opérations de l’AFC. « Je ne reconnais pas les institutions de Kinshasa, et ce qu’ils font là-bas ne m’engage pas », a réagi l’ancien président de la Ceni, contacté par Jeune Afrique. Le 25 juillet, il a été placé sous sanctions par le Trésor américain et, le lendemain, par l’Union européenne, qui a également ciblé sa plateforme politico-militaire.
Des accusations graves et des condamnations sévères
Le verdict du 8 août a confirmé les craintes des observateurs internationaux. Corneille Nangaa a été condamné à mort pour avoir entretenu « des liens avec une puissance étrangère, le Rwanda, et avec ses agents, pour entreprendre des hostilités contre la RDC ». Selon le président de la cour militaire, Nangaa n’a pas pris « les mesures nécessaires » pour empêcher les combattants du M23 de commettre des actes de violence, portant ainsi atteinte à l’intégrité territoriale de la RDC.
Bertrand Bisimwa, président de la branche politique du M23, et Sultani Makenga, commandant militaire du mouvement, ont également été condamnés pour « crimes de guerre », notamment pour « enrôlement d’enfants mineurs » et « homicide volontaire ». Dix-sept autres prévenus, dont le major Willy Ngoma, porte-parole militaire des rebelles, et l’ancien député Jean-Jacques Mamba, ont reçu des peines similaires.
Répercussions politiques et militaires
La sentence prononcée contre Corneille Nangaa et ses alliés intervient alors que les tensions dans le Nord-Kivu restent vives. Malgré l’entrée en vigueur d’un nouveau cessez-le-feu le 4 août, les rebelles du M23, soutenus par l’armée rwandaise, ont pris le contrôle de plusieurs localités, exacerbant une situation déjà précaire.
Pendant les deux semaines de procès, des révélations ont été faites sur les opérations de l’AFC. Éric Nkuba, l’un des prévenus, a décrit comment lui et Nangaa avaient collaboré avec des autorités ougandaises et rwandaises pour planifier des actions militaires contre la RDC. Ces révélations ont conduit à de nouvelles sanctions internationales, avec le Trésor américain et l’Union européenne ciblant Nangaa et sa plateforme politico-militaire.
En réaction à sa condamnation, Corneille Nangaa a nié toute légitimité aux institutions de Kinshasa, rejetant la sentence prononcée contre lui. Sa condamnation et celle de ses alliés constituent un signal fort du gouvernement congolais contre ceux qui menacent l’intégrité du pays, mais la stabilité de la région reste incertaine.