Le Tchad rompt avec la France : un nouveau revers pour Paris en Afrique
Le Tchad, dernier bastion sahélien de la présence militaire française, a décidé de rompre ses accords de défense avec Paris. Cette annonce, faite le 28 novembre 2024 par Abderaman Koulamallah, ministre tchadien des Affaires étrangères, marque un tournant dans les relations entre les deux pays. Officiellement signés et révisés en 2019, ces accords permettaient le stationnement de militaires français dans le cadre de la lutte contre le terrorisme dans le Sahel.
Cette décision intervient dans un contexte de tensions croissantes entre Paris et plusieurs pays africains. Après le Mali, le Burkina Faso et le Niger, la rupture tchadienne reflète un rejet accru de la présence française en Afrique francophone, souvent perçue comme une forme de néocolonialisme.
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Une annonce symbolique
La date du 28 novembre n’a pas été choisie au hasard : elle correspond au 66ᵉ anniversaire de la proclamation de la République du Tchad. Par cette décision, le gouvernement tchadien affirme son indépendance et sa souveraineté, appelant à « une transition harmonieuse » et à une révision des termes du partenariat avec la France.
Le ministre Koulamallah a toutefois insisté sur le maintien des liens d’amitié entre les deux pays et a laissé la porte ouverte à un dialogue pour explorer « de nouvelles formes de coopération ».
Un contexte chargé pour la diplomatie française
L’annonce tchadienne survient alors que la présence française en Afrique est mise à mal. Depuis 2021, les coups d’État au Mali, au Burkina Faso et au Niger ont conduit à l’expulsion des forces françaises. Ces retraits successifs, combinés à une opinion publique hostile à Paris, reflètent une dynamique de rejet généralisé des politiques de coopération militaire française.
Jean-Noël Barrot, ministre français des Affaires étrangères, se trouvait à N’Djamena pour une visite officielle au moment de l’annonce, mais aucun signe de désaccord n’avait filtré lors de son séjour. Il n’a pas commenté cette rupture, laissant place à des spéculations sur la manière dont Paris pourrait réagir.
Les enjeux pour N’Djamena et Paris
Avec environ 1 000 soldats français encore stationnés au Tchad, la rupture pourrait entraîner leur retrait progressif. Cependant, les termes de l’accord prévoient un délai de préavis et des modalités à respecter, ce qui laisse une marge pour des négociations.
Pour le président tchadien Mahamat Idriss Déby, cette décision représente un coup politique stratégique à l’approche des élections législatives. En se positionnant comme défenseur de la souveraineté nationale, il cherche à renforcer sa popularité auprès d’une population lassée de la présence étrangère.
Du côté français, cette rupture fragilise davantage l’influence de Paris dans une région clé. Elle illustre également l’échec de sa politique de maintien d’un rôle sécuritaire dominant en Afrique.
Un tournant pour l’Afrique francophone
Le cas du Tchad met en lumière une tendance plus large au sein de l’Afrique francophone : la volonté de se détacher des partenariats jugés déséquilibrés. Cette dynamique s’inscrit dans un contexte de montée en puissance de nouveaux acteurs comme la Russie et la Chine, qui offrent des alternatives économiques et militaires aux pays africains.
Le Tchad, historiquement un allié clé de la France, amorce ainsi un tournant décisif dans ses relations extérieures. Il reste à voir si cette décision marquera le début d’une coopération plus équilibrée ou accentuera la fragmentation des liens entre Paris et ses anciens partenaires africains.