Alors que le parti d’extrême droite Rassemblement National est arrivé en tête aux législatives anticipées en France dimanche 30 juin, les résultats sont scrutés partout dans le monde. À commencer par les partenaires européens, ainsi qu’en Ukraine, où une victoire du parti eurosceptique et réputé proche de Moscou fait craindre un changement dans les positions de Paris.
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Les réactions en Europe
Du côté du premier partenaire français et l’autre moitié du couple essentiel à l’Union européenne, l’Allemagne avait les yeux rivés de l’autre côté du Rhin. « La fin du macronisme » : pour le quotidien conservateur Die Welt, c’est une page qui se tourne en France. Le journal de Munich Süddeutsche Zeitung parle d’une césure historique, rapporte notre correspondant à Berlin, Pascal Thibault.
Emmanuel Macron en prend pour son grade dans les commentaires à chaud : « Par sa dissolution, il a ouvert les portes du pouvoir au RN », estime le magazine Die Zeit. Le quotidien conservateur Frankfurter Allgemeine juge le président français seul responsable de cette « débâcle » : « Un chef de l’État qui sans nécessité dissout et se prive de sa majorité ne peut pas espérer une mention positive dans les livres d’histoire », assène le journal. Il s’inquiète pour les conséquences internationales des législatives françaises : « La France pourrait être pour des années aux abonnés absents en Europe et au sein de l’Otan. Seule la Russie peut s’en réjouir. »
La classe politique est restée très prudente. Seul l’ancien ministre des Affaires européennes et actuel président de la commission des Affaires étrangères du Bundestag, le social-démocrate Michael Roth, a réagi estimant que « Cela ressemble à une nouvelle gifle pour Macron, l’Europe et l’amitié franco-allemande ». Le social-démocrate estime que son pays porte une part de responsabilité dans le résultat des législatives françaises : « Nous nous sommes trop peu demandé comment nous pouvions plus soutenir le pro-européen Macron. Nous ne tenons pas suffisamment compte des débats politiques et des problèmes dans d’autres pays. »
Les inquiétudes de Bruxelles et Kiev suite aux probables résultats des Législatives
Au siège de l’Union européenne à Bruxelles, aucune réaction n’a eu lieu dimanche soir : officiellement, les institutions et les autorités européennes gardent le silence et elles continueront encore à le faire après ce premier tour, rapporte notre correspondant à Bruxelles, Jean-Jacques Héry. Mais Bruxelles craint l’arrivée du Rassemblement National, parti anti-européen, à la tête du gouvernement d’un des membres fondateurs de l’UE. D’autant que la France est également à la fois deuxième contributeur au budget de l’Union européenne et son deuxième pays le plus peuplé.
De plus, le partage du pouvoir au sommet de l’exécutif français pourrait affaiblir la position du président Emmanuel Macron, qui continuera à siéger au Conseil européen. Cela en plus du risque d’avoir une cacophonie entre représentants français, menant à une politique européenne plus floue.
Mais parmi les sujets qui inquiètent Bruxelles, il y a la question du soutien à l’Ukraine dans sa guerre contre la Russie. Cela notamment dans le contexte où le parti de Marine Le Pen a affiché depuis longtemps sa proximité avec la Russie, que ce soit via des prêts contractés auprès de banques russes ou lorsque la cheffe de file de l’extrême droite française a été reçue par le président Vladimir Poutine.
Cette proximité du RN vis-à-vis du Kremlin est une grande inquiétude pour Kiev également, Paris ayant été l’un des soutiens les plus constants de l’Ukraine dans son effort de guerre.
Si les médias de Kiev n’ont pas encore réagi dimanche soir 30 juin aux résultats des élections en France, la situation politique française est suivie de très près à Bankova, le siège de la présidence ukrainienne à Kiev, rapporte notre correspondant à Kiev, Stéphane Siohan. Cette semaine, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a en effet souhaité glisser des messages à l’opinion française, se disant convaincu « que le gouvernement français issu des élections continuerait de soutenir l’Ukraine, quelle que soit la nouvelle donne politique, à la fois sur le champ de bataille et sur le chemin de l’adhésion à l’Union européenne ».
Ce faisant, Volodymyr Zelensky adopte une attitude prudente. Un peu la même que lorsqu’on l’interroge sur la perspective d’une élection de Donald Trump aux États-Unis cette année.
L’arrivée d’un nouveau gouvernement, à Paris, sera forcément scrutée de très près à Kiev, car les enjeux sont majeurs pour l’Ukraine. Le président Emmanuel Macron, depuis quelques mois, a affirmé un leadership de plus en plus fort en Europe dans le soutien à l’Ukraine, avec notamment l’annonce de l’envoi d’avions de chasse Mirage 2000 en Ukraine et la possibilité entrouverte de déployer des personnels militaires de formation sur le territoire ukrainien.
Le scrutin législatif français n’est pas seulement un enjeu national mais a des répercussions importantes sur la scène internationale, avec des implications directes sur l’Union européenne et le soutien à l’Ukraine. La probable victoire du Rassemblement National fait déjà trembler les partenaires européens et les alliés de la France, inquiétés par les changements politiques et géopolitiques potentiels.