Polémique autour de l’article 185 du code pénal : Le PPA-CI accuse le gouvernement de « muséler » l’opposition
La récente déclaration de Me Abdoulaye Meité sur l’article 185, avocat de l’État de Côte d’Ivoire et député de Kani, a suscité une vive controverse. Lors de son intervention sur le plateau de NCI le dimanche 9 juin 2024, Me Meité a affirmé : « M. Laurent Gbagbo a été condamné par la justice ivoirienne à une peine d’emprisonnement. Si aujourd’hui le PPA-CI ou des individus lancent un appel au public à l’effet de contrarier l’autorité, en solidarité avec M. Laurent Gbagbo, ils tombent sous le coup de l’article 185 du nouveau code pénal ivoirien. »
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Cette déclaration a provoqué une onde de choc au sein du Parti des peuples africains-Côte d’Ivoire (PPA-CI). Le parti de Laurent Gbagbo perçoit cette affirmation comme une preuve supplémentaire de l’intention du gouvernement d’utiliser la justice et la législation pour restreindre la liberté d’expression et empêcher toute contestation politique. Selon le PPA-CI, le gouvernement cherche ainsi à sécuriser un terrain favorable avant les élections prévues pour 2025.
Malgré son exclusion du fichier électoral, Laurent Gbagbo, désigné candidat du PPA-CI pour la prochaine élection présidentielle, reste une figure centrale de la politique ivoirienne. La grâce présidentielle dont il a bénéficié n’efface pas sa condamnation à 20 ans de prison prononcée par la justice ivoirienne dans le cadre de l’affaire dite du braquage de la BCEAO. À 16 mois du prochain scrutin présidentiel, son parti dénonce une condamnation politique et reste déterminé à obtenir sa réinscription sur le listing électoral.
L’article 185 : Une question qui concerne directement le gouvernement
La question de la réinscription de Laurent Gbagbo sur la liste électorale est une affaire complexe qui interpelle directement le gouvernement. En mars dernier, Damana Pickass, vice-président du Front Populaire Ivoirien (FPI), déclarait : « Cette affaire de réinscription de Laurent Gbagbo sur la liste électorale est une question qui concerne directement le gouvernement. Et il faut que le gouvernement analyse cela avec beaucoup de bienveillance. » Pickass a également exhorté les militants et sympathisants à se tenir prêts pour d’éventuels mots d’ordre.
L’article 185 du nouveau code pénal ivoirien, mentionné par Me Meité, stipule que toute incitation à troubler l’ordre public ou à défier l’autorité peut entraîner des sanctions sévères, y compris l’emprisonnement. Cette législation, récemment mise à jour, est perçue par de nombreux critiques comme un outil de contrôle politique plutôt qu’une mesure de maintien de l’ordre.
Le texte a été adopté à la majorité, par 124 députés.
Mais 72 députés de l’opposition l’ont rejeté, car il comprend un alinéa qui, à leurs yeux, entrave la liberté d’opinion. Il s’agit de l’article 185, qui vise une tierce personne qui ferait « l’apologie des crimes (…) ou qui lance des appels au public dans le dessein de faire désapprouver l’autorité et de provoquer la solidarité avec un ou plusieurs condamnés ».
« C’est excessif, c’est la liberté d’expression qui est remise en cause », s’indigne Hubert Oulaye, le président du groupe parlementaire du PPA-CI. « Cette disposition a été étendue aux faits de trouble à l’ordre public et d’attentat à la sûreté de l’État », relève ce responsable politique qui, à un an de présidentielle, y voit une manière de « museler l’opposition ».
Alors que la campagne électorale se profile à l’horizon, le débat sur la liberté d’expression et les droits politiques en Côte d’Ivoire ne fait que commencer. Le monde entier observe avec attention comment le pays naviguera ces eaux tumultueuses pour assurer une élection libre, équitable et transparente. Les tensions entre le PPA-CI et le gouvernement ivoirien ne cessent de croître sur cet article 185, rendant l’environnement politique de plus en plus volatile à l’approche du scrutin de 2025.